Un film de Peter Weir
Pays d'origine Etats-Unis
Durée 2h14
Sortie en France 31/12/2003

Avec
Russell Crowe (le capitaine Jack Aubrey)
Paul Bettany (le docteur Stephen Maturin)
Billy Boyd (Barrett Bonden)
James d'Arcy (le lieutenant Thomas Pullings)
Lee Ingleby (Hollom)
George Innes (le marin Joe Plaice)

Scénario Peter Weir et John Collee
Production Samuel Goldwyn Jr. et Duncan Henderson
Distribution United International Pictures (U.I.P.), France




 

Master and commander : de l'autre côté du monde
(Master and commander : the far side of the world)
 
Guerre maritime et paix intérieure
 

03/01/2004
Si le récent affrontement entre la France et l’Angleterre pendant la dernière coupe de monde de rugby, ne vous a pas rassasié, allez donc voir son remake maritime qui vient de sortir au cinéma sous le titre martial de « Master and Commander ». Tiré de la série romanesque de Patrick O’Brien, ce film marque également le retour au premier plan de Peter Weir, cinéaste touche-à-tout au parcours très inégal. Sa mise en scène articule remarquablement ici le grand spectacle et l’intime, l’épopée et la chronique pour aboutir à un excellent divertissement, digne de la flamboyance de l’âge d’or hollywoodien.

Chasse en mer

Nous sommes embarqués à bord du Surprise, vaisseau britannique qui a pour mission de neutraliser l’Achéron, mythique bateau français qui va exporter dans le Pacifique, la guerre qui ravage l’Europe au début du 19ème siècle. On y suit donc la vie quotidienne du Surprise, à travers une galerie de personnages typiques tant moralement que physiquement. A commencer bien sûr par son capitaine intrépide, Jack la Chance (interprété par un Russell Crowe très crédible dans une performance où l’outrance du rôle pouvait tourner au ridicule), marin légendaire et paternaliste, admiré et aimé de ses hommes. On y suit également un médecin naturaliste, épris de découvertes scientifiques et plusieurs jeunes sous-officiers dévoués mais tourmentés par l’ambition ou par des démons. Les couches les plus basses de l’équipage ne sont pas oubliées et on pénètre ainsi dans toutes les strates du bateau, de son noble leadership jusqu’à son prolétariat, dans un saisissant raccourci d’une société anglaise profondément clivée en classes sociales.
C’est indiscutablement une des grandes qualités du film, sa volonté de description réaliste de l’existence de cette communauté hiérarchisée mais soudée par le code de l’honneur et des règles immuables, faites de traditions et de superstitions. On pourrait en sourire tant cet aspect semble a priori idyllique mais le flegme et le respect qui émanent littéralement de tous ces marins, indépendamment de leur origine, de leur position et de leur âge, les rendent véritablement attachants. Leur dévouement allant même jusqu’au sacrifice pour sauvegarder l’intérêt général.
Mais quoi de mieux qu’un adversaire terrifiant et invincible pour créer une profonde solidarité ? Si ces patriotes fervents prennent à cœur leur mission, au service du Roi dans son combat contre Napoléon, leur sens du devoir est ici transcendé par la fascination mêlée d’effroi que leur inspire l’Achéron. C’est l’une des grandes idées du film, que l’on pourrait rapprocher du « Duel » de Spielberg : on ne voit pratiquement rien du vaisseau français, si ce n’est une lointaine silhouette qui déchire les flots et attaque par surprise. C’est au sens premier du terme, un bateau fantôme, obscure menace surnaturelle, qui apparaît soudainement pour mieux disparaître. C’est la figure même de l’Autre, qui inquiète d’autant plus que l’on ne connaît que très peu de choses sur lui.

A la découverte du Monde

D’un postulat de western (la poursuite et le duel), on bascule subtilement dans un beau fantastique (l’irrationnel et les spectres). Capitaine Jack fait de cette chasse une affaire personnelle (mélange de revanche, de sens exacerbé de sa tâche et d’accomplissement de soi), entraînant avec lui son équipage, prêt à le suivre au bout du monde. Et ils y arrivent, plus précisément aux Iles Galápagos, Ailleurs merveilleux qui s’avère être le terrain de jeu de très belles robinsonnades poétiques et scientifiques. Le Monde n’est pas fini, il prend souvent les allures d’une page blanche sur laquelle tout est à écrire. Le médecin symbolise cet Honnête Homme, explorateur passionné et fin. Le temps se suspend alors mais la quête doit s’achever. C’est l’objet de l’assaut final, fruit de la ruse et du courage des hommes du Surprise. Ce morceau de bravoure est le dernier du film, qui en comporte bien d’autres, tous plus formidables les uns que les autres. Car le film a un impératif de spectaculaire, qu’il remplit à la perfection. Quelques unes de ces séquences fortes feront date tant nous sommes pris au cœur de ces batailles maritimes, brinquebalés d’un bout à l’autre du navire. Leur réalisme est saisissant et ne sent jamais la reconstitution virtuelle. La mise en scène de Peter Weir fait bien ressortir l’épaisseur humaine de ces combats féroces face à l’ennemi et de ces épreuves contre une Nature en furie. Le spectacle de « Master and Commander » n’est pas celui des parcs d’attraction mais celui des espoirs et de la souffrance des hommes.


.::Samuel
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